Article sur www.slate.fr de Nathaniel Frank Traduit par Antoine Bourguilleau
Contrairement à ce que disent ceux qui s’opposent au mariage pour tous et à l’homoparentalité, le consensus scientifique porte sur le fait que les enfants élevés par des parents homosexuels ne rencontrent pas de problèmes particuliers par rapport à ceux qui le sont par des parents hétérosexuels.
Début février, une étude a été publiée qui concluait que les adolescents néerlandais élevés par deux mamans lesbiennes «ne présentaient aucune différence significative» avec les ados issus de mariages hétérosexuels. Fin janvier, une autre étude a montré exactement le contraire: «Les problèmes émotionnels sont deux fois plus importants (…) chez les enfants élevés par des parents du même sexe que chez les enfants élevés par des parents du sexe opposé.»
Regardons les études publiées depuis les années 1980
Cette dernière recherche tombe à point nommé aux Etats-Unis, car la Cour suprême va auditionner sur le sujet du mariage entre personnes du même sexe cet été et la dernière fois qu’elle s’est penchée sur cette question, en 2013, des interrogations ont surgi sur l’impact du mariage gay sur les enfants.
Lors de ces auditions, le juge Antonin Scalia avait affirmé qu’il existait «des désaccords considérables chez les sociologues sur les conséquences de l’éducation d’un enfant au sein d’une famille avec des parents de même sexe et sur leur nocivité pour les enfants». Le juge Anthony Kennedy avait quant à lui décidé de se pencher sur les dégâts «immédiats» possiblement infligés en ce moment même aux 40.000 enfants californiens issus d’une union de parents du même sexe. «La voix de ces enfants compte sur cette question, vous ne trouvez pas?», avait-il déclaré.
Mais que disent VRAIMENT les recherches sur la manière dont l’homoparentalité affecte les enfants? Et quels sont les liens –si tant est qu’il faille en trouver– entre l’homoparentalité et le droit au mariage pour des couples du même sexe?
Dans un projet lancé en janvier, une équipe que je dirige au sein de la Columbia Law School a réuni sur un même site Internet les résumés de toutes les études (ayant fait l’objet d’une évaluation par des pairs) publiées sur le sujet depuis les années 1980, afin que chacun puisse lire les recherches directement au lieu de s’appuyer sur les dires de telle ou telle personnalité médiatique ou de pensée de groupe.
Même quand nous n’étions pas d’accord avec les conclusions d’une étude –sur la manière dont les chercheurs avaient interprété les données– nous l’avons incluse si elle avait fait l’objet d’une évaluation (positive) par des pairs et qu’elle traitait du sujet. L’évaluation par les pairs n’est pas la panacée, mais c’est tout de même une des meilleures méthodes pour s’assurer que les conclusions d’une recherche sont, a minima, le produit d’efforts entrepris de bonne foi pour parvenir à la vérité.
Ce projet est celui qui réunit le plus grand nombre d’études scientifiques sérieuses sur l’homoparentalité à ce jour.
Nous avons trouvé 71 études qui concluaient que les enfants avec des parents homosexuels ne rencontraient pas de problèmes particuliers comparés aux enfants issus de couples de sexes opposés et seulement quatre qui concluaient qu’ils rencontraient des problèmes spécifiques. Ces quatre études souffraient toutes des mêmes limites flagrantes: les enfants avec des parents homosexuels étaient mis dans le même sac que des enfants issus de couples séparés, une catégorie d’enfants dont on sait qu’ils sont davantage à risque et que cela est dû au (potentiel) traumatisme de la dissolution familiale.