Par Blaise GAUQUELIN
Libération
Ni manifestations avec des grandes fratries ni prières de rue. L’Autriche a reconnu l’homoparentalité en pleine torpeur estivale, au terme d’un débat parlementaire aussi court que soporifique. A partir de jeudi, il y aura donc des enfants avec deux papas ou deux mamans. Des familles légales. Ce petit miracle en terre catholique a été rendu possible par la Cour européenne des droits de l’homme : le 19 février, après la plainte de deux lesbiennes, elle a condamné l’Autriche pour discrimination. Selon elle, Vienne ne peut pas d’un côté autoriser des hétéros non mariés à adopter des enfants issus d’une première union et de l’autre dire à des femmes homosexuelles qui veulent faire la même chose : «Allez voir ailleurs, deux mamans, ça n’existe pas !»
Les opposants au mariage pour tous en France s’étaient emparés de l’affaire, y voyant le signe que ce sacro-saint principe européen de non-discrimination ne faisait que dicter aux Etats leur politique sociétale. Mais l’Autriche n’avait pas été condamnée sans raison. Contrairement à la France, elle avait une loi établissant clairement une discrimination selon l’orientation sexuelle des couples non mariés. Du coup, elle n’avait le choix qu’entre deux options : soit elle accordait la coparentalité aux homos, soit il fallait obliger les beaux-pères hétéros en union libre à se marier pour se faire légalement appeler papa.
Sa loi, l’Autriche l’a donc faite en se bouchant le nez. Concrètement, elle n’autorise pas l’adoption conjointe d’enfants par des homos ni le mariage gay. Elle permet seulement aux gays et lesbiennes d’adopter les enfants de leur conjoint issus d’une union hétéro préalable ou, pour les lesbiennes, conçus par insémination artificielle à l’étranger. Mais elle est bonne à prendre quand même, selon Barbara Schlachter-Delgado, la présidente de l’association des familles homoparentales FamOs. «Ma propre petite famille arc-en-ciel se réjouit de bientôt pouvoir devenir officielle», proclame la jeune Viennoise, qui élève son fils de 4 ans conçu par PMA avec une autre femme. L’extrême droite, qui avait prévu de polémiquer sur «l’ouverture de la boîte de pandore à cause du diktat européen», a préféré faire profil bas après qu’un de ses députés les plus connus a révélé son homosexualité.


