Durant leur parcours de transition, de nombreuses femmes trans* désirent une augmentation mammaire afin d’avoir une poitrine féminine correspondant à l’image qu’elles ont d’elles-mêmes. Rarement, en effet, le traitement hormonal suffit à atteindre un résultat satisfaisant pour la personne en souffrance.
Depuis le 7 juin 1994 et l’ATF 120 V 463 les chirurgies d’augmentation mammaire pour les femmes trans* sont à la charge de l’assurance obligatoire de soins. Le Tribunal fédéral ne l’a jamais remis en question.
Pourtant les associations de défense des personnes transgenres constatent régulièrement que certaines caisses maladie essaient de refuser cette prise en charge en arguant, d’une part que cette intervention ne serait que de nature esthétique, et d’autre part que sa prise en charge violerait le principe d’égalité de traitement entre personnes cisgenres et transgenres. Ces refus se sont accélérés depuis l’an dernier et deux membres de notre association n’ont obtenu leur prise en charge qu’après de gros efforts pour l’une et un combat épique pour l’autre.
Le 17 février 2017, le Tribunal fédéral a pourtant débouté une recourante transgenre qui demandait le remboursement de sa chirurgie mammaire (ATF 9C_255/2016). Une lecture attentive de cet arrêt montre qu’il ne remet rien en question, mais malheureusement, certaines caisses essaient manifestement d’en profiter.

En effet, le Tribunal fédéral répète une nouvelle fois, au point 5.2 : «Dans le contexte d’une dysphorie de genre, pour autant que l’indication à une opération de changement de sexe est établie, une augmentation mammaire doit être reconnue comme une intervention complémentaire destinée à modifier les caractères sexuels secondaires si cette mesure fait partie d’un programme thérapeutique global établi en fonction de l’ensemble des éléments recueillis et si, à l’intérieur de ce plan, elle peut être considérée comme efficace, appropriée et économique. En principe, la prise en charge des coûts entre alors en considération pour une prestation qui en soi ne constitue pas une mesure à la charge de l’assurance obligatoire des soins.»
En clair, l’augmentation mammaire dans le cadre du traitement de la dysphorie de genre d’une personne MtF est toujours à la charge de l’assurance obligatoire de soins. Il est par contre étonnant, et contraire au droit européen, que le TF pose comme condition que l’opération de réassignation soit établie et que la chirurgie mammaire ne soit que complémentaire. En effet, la CEDH a régulièrement rappelé qu’un État ne peut imposer la chirurgie de réassignation à une personne transgenre, ce genre d’obligation violant gravement la liberté fondamentale de tout un chacun à disposer de son corps.
La lecture détaillée dudit arrêt démontre que la demande de prise en charge doit respecter une forme et des critères précis, forme et critères pas toujours connus des médecins qui établissent de telles demandes (psychiatres ou chirurgiens).
En conclusion, si vous êtes une femme trans*, ou une personne en questionnement, concernée par une telle opération, assurez-vous que votre demande sera correctement formulée, en principe par votre psychiatre, afin d’éviter toute déconvenue ou combat épuisant ultérieurement.
Lynn