Phase préparatoire en vue d’une enquête-actions sur les besoins des aîné.e.s lesbiennes, gays, bi et trans* (LGBT) à Genève
par l’association 360 mandatée par la Ville de Genève
Les objectifs de la pré-enquête
Cette pré-enquête a eu pour but de définir les moyens nécessaires à la réalisation d’une rechercheaction permettant de mieux connaître la réalité et les besoins des aîné.e.s lesbiennes, gays, bisexuel.le.s et transgenres (LGBT) et de réaliser un état des lieux du dispositif genevois existant pour cette population. Cette pré-enquête a eu également l’ambition de poser les jalons structurels d’une recherche-action qui sera menée jusqu’en 2019.
L’association 360 a créé le Projet aîné.e.s LGBT afin d’accompagner tout ce processus.
Les aîné.e.s LGBT à Genève
En 2016, il y aurait entre 4’000 et 8’000 aîné.e.s LGBT dans le Canton de Genève. La proportion d’aîné.e.s augmentera fortement (de 16,2% en 2013 à 23% en 2040): on peut donc estimer que les aîné.e.s LGBT seront entre 7’000 et 15’000 dans le Canton de Genève en 2040 et entre 2’500 et 5’000 en Ville de Genève.
Le parcours de vie des personnes LGBT de plus de 65 ans est considéré comme plus chaotique et
irrégulier que celui de la population générale des aîné.e.s. De manière générale, les personnes LGBT sont davantage touchées par des problématiques de discrimination et d’exclusion sociale. Contrairement aux personnes hétérosexuelles, de par leurs parcours, les aîné.e.s LGBT disposent en outre d’un réseau de proches aidant.e.s amoindri: ils n’ont souvent pas eu d’enfants ou ont été plus fréquemment rejetés par leur entourage.
Le manque d’information et de formation du personnel
De nombreuses études internationales et helvétiques se sont intéressées aux connaissances et à la formation des personnes travaillant dans des institutions offrant des prestations aux aîné.e.s. Leurs conclusions montrent de grandes lacunes dans tout ce qui a trait à l’identité de genre, à l’orientation sexuelle et plus généralement aux questions en lien avec la vieillesse arc-en-ciel.
Le nombre de métiers et de structures interagissant avec les aîné.e.s est diversifié et rend complexe l’implémentation d’une formation de base unique en amont sur les questions LGBT.
Exemples d’actions à mener
- Réalisation de modules de formation dans les EMS en collaboration avec d’autres associations actives dans le domaine de la sexualité des aîné.e.s, du VIH et des aîné.e.s LGBT;
- Création d’un réseau d’employé.e.s allié.e.s ;
- Création d’un label LGBT-friendly et établissement de critères d’obtention pour toutes les institutions délivrant des prestations aux aîné.e.s.
- Valorisation de la mémoire des aîné.e.s LGBT en créant un centre inter-associatif d’archivage;
- Organisation d’Assises de la vieillesse LGBT.
- Intégration des aîné.e.s LGBT dans les outils statistiques des institutions.
- Création d’un label LGBT-friendly et établissement de critères d’obtention pour les EMS et les IEPA
En quelques chiffres:
- Les personnes homosexuelles et bisexuelles vivent bien plus souvent seules (respectivement 48% et 34%) que les hétérosexuelles (24%) (France) ;
- • Seuls 14% des couples homosexuels vivent avec au moins un enfant (contre 27% pour les hétérosexuels). Les possibilités d’avoir des proches aidant.e.s pour les aîné.e.s LGBT sont réduites par rapport à la population hétérosexuelle ou sont (peut-être) restreintes à un cercle amical proche. (France) ;
- • Plus de la moitié des aîné.e.s LGBT ont reçu de leur médecin un diagnostic de dépression. 16% des personnes transgenres de 65 ans et plus ont tenté au moins une fois de mettre fin à leur jour. (USA).
EMS, proches aidants, soins à domicile et besoins de santé
La situation des ainée.s. LGBT résidant dans des EMS ou suivi.e.s par les institutions de soins à domicile est difficilement identifiable au niveau genevois et suisse. Selon les différents entretiens réalisés lors de cette pré-enquête, peu d’institutions genevoises disent avoir déjà eu des personnes LGBT. Plusieurs personnes travaillant dans des EMS de Suisse romande ont affirmé avoir suivi des aîné.e.s LGBT dans leur institution mais considéraient dans le même temps qu’ils.elles étaient rares ou que leur identification en tant que personne LGBT ne relevait que de la pure supposition.
Les aîné.e.s LGBT craignent particulièrement le fait de devoir cacher leur orientation ou leur identité au sein d’une institution, alors qu’elle a été déjà assumée et visibilisée à l’extérieur. Ceux.celles-ci ont particulièrement peur d’être discriminé.e.s par les résident.e.s ou les employé.e.s.
En termes de santé globale, les besoins de santé des lesbiennes, des gays ou des personnes bisexuelles diffèrent peu de ceux de la population générale des aîné.e.s. Néanmoins, certains points spécifiques doivent attirer notre attention: pour les personnes trans*, les études révèlent notamment une méconnaissance du personnel dans ce qui a trait à la prise d’hormones dans le grand âge. Les aînés gays sont davantage touchés par le VIH que les aînés hétérosexuels. Enfin les femmes aîné.e.s lesbiennes cumulent les fragilités : elles ont un suivi gynécologique plus faible que les femmes hétérosexuelles, ce qui pourrait avoir des conséquences sur le long terme.
Vie sociale et quotidienne
Les lieux sociaux et les associations aident à lutter contre l’exclusion et la solitude, mais permettent également à la collectivité publique de garder un suivi nécessaire avec les seniors. Il s’écoule en moyenne 15 ans entre le moment où les aîné.e.s entament leur retraite et le moment où celles-ci et ceux-ci bénéficient éventuellement de prestations de soins à domicile ou entrent en EMS. Cette étape de vie est donc essentielle.
Les aîné.e.s LGBT sont invisible dans les club d’aîné.e.s. Il est difficile d’évaluer si cette absence de personnes LGBT prend sa source dans le fait que ces dernières vivent de manière cachée (pour des raisons liées à leurs parcours de vie, selon qu’elles ou ils aient fait ou non leur coming out) ou parce qu’elles ne s’y rendent tout simplement pas. Aucune évaluation n’a été faite jusqu’ici par les institutions publiques concernées.
Du côté associatif, Tamalou est le groupe des seniors de l’association 360. Il est membre de la Plateforme des associations d’aînés de Genève. Les aînées lesbiennes connaissent une moindre mobilisation : un groupe pilote a été créé par l’association 360 début 2018 suite aux conclusions de la pré-enquête. Le nombre restreint de personnes trans* à l’heure actuelle n’a pas permis de créer un groupe spécifique, mais les choses pourraient évoluer dans ce sens ces prochaines années.
Les aînés LGBT sont davantage touchés par la précarité économique. Elles et ils cumulent à la fois les fragilités de la population générale des seniors et celles des LGBT. Les parcours de vie des LGBT sont davantage fractionnés, plus solitaires, ce qui péjorerait concrètement le montant des retraites ou la possibilité d’obtenir des aides sociales à l’âge de la retraite.
En quelques chiffres:
- Les personnes homosexuelles et bisexuelles vivent bien plus souvent seules (respectivement 48% et 34%) que les hétérosexuelles (24%) (France) ;
- • Seuls 14% des couples homosexuels vivent avec au moins un enfant (contre 27% pour les hétérosexuels). Les possibilités d’avoir des proches aidant.e.s pour les aîné.e.s LGBT sont réduites par rapport à la population hétérosexuelle ou sont (peut-être) restreintes à un cercle amical proche. (France) ;
- • Plus de la moitié des aîné.e.s LGBT ont reçu de leur médecin un diagnostic de dépression. 16% des personnes transgenres de 65 ans et plus ont tenté au moins une fois de mettre fin à leur jour. (USA).
Conclusion de la pré-enquête
Les vieillesses sont multiples et doivent donc être perçues avec leurs spécificités. Les efforts investis par les collectivités, les institutions et les associations pour intégrer certaines communautés dans leur politiques publiques sont essentiels. La levée des tabous, l’amélioration des pratiques à l’égard des aîné.e.s LGBT bénéficiera à l’ensemble des seniors quelles que soient leur orientation sexuelle et leur identité de genre, notamment par une meilleure prise en compte de leurs besoins relationnels et sexuels.
Il est donc opportun et nécessaire pour l’association 360 de développer un recherche et un plan d’action sur cette thématique et dans le cadre de son nouveau projet aîné.e.s LGBT.
Genève, mai 2018